Sur le quai Saint-Pierre, les seniors délogent les étudiants

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le 01 juillet 2020

[ mis à jour le 12 novembre 2021 ]

SOMMAIRE

Après plusieurs changements de cap, le bâtiment situé sur les allées de Brienne - à deux pas du quai Saint-Pierre - appartenant autrefois à ERDF, va faire l’objet d’un programme immobilier à Toulouse, à destination des personnes âgées. Pourquoi les riverains avaient-ils rejeté le premier projet consistant à accueillir l’Institut d'Études Politiques ? Le programme urbain respectera-t-il l’esprit de cet immeuble construit au XVIIIème siècle dans le cadre du “plan Saget” ?

© Antoine2K

Une vue Garonne pour les seniors

Projet mené par le promoteur immobilier Thierry Oldak, le programme situé à Saint-Pierre prévoit la construction de 95 logements neufs - du T1 au T3 - destinés aux seniors. Avec une emprise de près de 6.000m², le bâtiment pourra également loger une salle multi-activités ainsi qu’une cuisine commune adjacente. Quelques appartements bénéficieront d’un espace extérieur (balcons, loggias). Cela fait désormais 4 ans que le promoteur précité pense ce programme dont les plans ont été présentés aux riverains avant l’été. Le projet, qui a pris du retard (Thierry Oldak avait fixé un début de travaux à l’été 2017), est une “version bis” d’un projet plus controversé.

« C’est un bâtiment dont la façade a été dessinée par l’urbaniste du XVIIIème siècle Joseph-Marie de Saget. On ne peut pas trop le surélever mis à part un petit peu sur les côtés avec l’accord des bâtiments de France qui suivent le dossier. L’objectif est de le vendre en un seul bloc à une société patrimoniale. C’est cette solution que j’ai choisie car je ne souhaitais pas diviser cet ensemble », Thierry Oldak - Extrait de l’article “Quai Saint-Pierre, une résidence pour seniors pour remplacer le projet Sciences-Po Toulouse”, publié le 10 novembre 2016 sur Actu Toulouse.

C’est l’architecte montalbanais Axel Letellier, dont l’agence est implantée à Toulouse, qui a été choisi pour mener à bien cette entreprise périlleuse. En effet, il sera question de créer un nouvel espace de vie tout en conservant l’esprit architectural du bâti pensé par Joseph-Marie de Saget. Aussi, bien qu’une surélévation de l’immeuble soit prévue, la façade ancienne, faite de briques récemment restaurées, sera conservée.

La fusion du neuf et de l’ancien

Se définissant lui-même comme un “architecte du patrimoine”, Axel Letellier a été sélectionné précisément parce que son cabinet se trouve à la croisée des chemins entre “patrimoine pur” et “neuf pur”. Le professionnel propose en effet des prestations qui mixent l’existant avec les attentes actuelles. En témoigne le projet du château de Bernadou, situé dans la ville de Villemur-sur-Tarn. Il était question, comme pour l’immeuble du quai Saint-Pierre, d’allier des problématiques de façades ancestrales avec une intégration dans la ville moderne, dans le respect du quotidien des Villemuriens.

« Le premier objectif du projet était de rendre accessible et fonctionnel le château, tout en respectant son organisation intérieure et la qualité de ses pièces « nobles ». Pour cette raison, la plupart des locaux techniques et les nouvelles circulations horizontales et verticales ont été prévues dans l’extension, et le découpage des locaux existants a été réduit au minimum. Un ascenseur a été installé à proximité de l’escalier d’honneur, qui est conservé et mis en valeur » - Extrait de la fiche projet “Centre socio culturel - Château de Bernadou” sur archicontemporaine.org, Le panorama en images du Réseau des maisons de l'architecture.

La collaboration qui a lieu entre le Groupe de promotion Oldak et le cabinet Letellier Architectes a été rendu possible par l’ouverture du marché des monuments historiques aux architectes du patrimoine, autrefois réservé aux architectes en chef des monuments historiques.

Par ailleurs, les équipes d’Axel Letellier sont à l’origine de rénovations d’envergure comme :

Un bâtiment prisé et protégé

Alors que le bâtiment situé sur les allées de Brienne à Toulouse tend à loger des seniors, il était autrefois destiné à l’installation de l’établissement d’enseignement supérieur Sciences Politiques. Pourquoi le projet a-t-il été abandonné au profit d’une résidence d’habitations ?

Rejet du projet "Science Po"

En 2013, Toulouse Métropole utilise son droit de préemption pour installer Sciences Politiques le long du quai Saint-Pierre, dans un local d’ERDF. Si la présence d’étudiants supplémentaires ne semble, à l’époque, pas poser de problèmes aux riverains - la Manufacture des Tabacs, toute proche, glâne déjà son lot d’élèves - c’est l’optique d’une ombre portée de 25 mètres de haut qui effraie alors les résidents de l’immeuble “Saint-Pierre”. Les fenêtres de cinq appartements devaient avoir une vue réduite du fait de la présence d’un mur situé à trois mètres des ouvertures donnant sur les cuisines des habitants. Cette proposition avaient soulevé la colère des riverains qui s’étaient organisés pour la réduire à néant.

« Les habitants du quartier Saint-Pierre se mobilisent contre le projet d’implantation du futur IEP au 10, quai Saint-Pierre », la pétition aurait recueilli 276 signatures en cette seule journée de dimanche, selon Dominique Bravelet, l’une des membres de l’association de sauvegarde du quai Saint-Pierre » - Extrait de l’article “Toulouse. Saint-Pierre. Le projet Science Po, à quai, inquiète les riverains”, publié dans La Dépêche en ligne le 02 juillet 2013.

D’après le maître d’ouvrage, quelques fenêtres situées à l’arrière de la résidence Saint-Pierre, malgré leur construction en limite de propriété, ne donnaient pourtant pas lieu à une servitude de vue sur la Garonne du fait de la date de construction de la résidence : 1994 - 1995 alors qu’il faut 30 ans pour que la servitude s’applique. Devant l’agitation des résidents et habitants du quartier, l’implantation de l’Institut d’Études Politiques, alors estimé à 23,6 millions par l’université, a été annulée. Elle devait se faire sous la houlette du cabinet toulousain GGR architectes (Gouwy-Grima-Rames), qui avait remporté un concours face à 60 cabinets internationaux.

« L’idée était d’intégrer le contemporain à l’ancien, il fallait préserver la façade classée côté Garonne, construite à l’époque par l’architecte toulousain Joseph-Marie de Saget», explique Laurent Gouwy. « L’architecte des Bâtiments de France a demandé que ce bâtiment soit rehaussé pour faire pendant à celui qui se trouve à l’autre bout du quai, côté écluse », indique Bruno Sire - Extrait de l’article “Toulouse. L'Institut d'études politiques s'offre la vue sur la Garonne”, publié le 15 mai 2013 sur La Dépêche en ligne.
Didier Descouens / CC BY-SA (https://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0) via Wikimedia Commons

Un bâtiment historique

L’immeuble dans lequel prendra finalement place la résidence pour seniors fut construit au XVIIIème siècle selon les plans de Joseph-Marie de Saget, en charge de l’embellissement des grandes villes de provinces sous le contrôle de l’intendant. Directeur des travaux publics de la Province du Languedoc à compter de 1752, l’homme prendra également la tête des travaux des quais Saint-Cyprien et du canal de Brienne.

Le plan Saget demeure à l’heure actuelle la source graphique la plus détaillée du Toulouse du milieu du XVIIIème siècle. Le document est conservé aux Archives municipales de Toulouse.

SOURCES

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