Les toulousains vont-ils anéantir le projet de la Tour d'Occitanie ?

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Avatar Hélène BERTIER Hélène Bertier

le 01 juillet 2020

[ mis à jour le 03 juin 2021 ]

SOMMAIRE

Cela fait presque une décennie que le projet est sur les rails. Surnommé « TESO », pour Toulouse EuroSudOuest, il s’agit de la plus ambitieuse opération urbaine de ce début de siècle. Son but final ? Inscrire la gare, les faubourgs et le centre-ville dans une dynamique nouvelle, structurée autour d’un Pôle d’Echanges Multimodal et d’un nouveau quartier d’affaires d’envergure métropolitaine.

Concrètement, Toulouse EuroSudOuest vise à donner à la métropole les moyens de relever les défis générés par son dynamisme, en s’appuyant sur deux leviers indissociables : le développement des transports et l’aménagement urbain. A terme, les aménageurs veulent étendre le centre-ville par-delà les boulevards, lui faire embrasser les bordures des parvis de la gare qui, devenus espaces de vie et d’échanges, accompagneront le ballet des voyageurs et des riverains pour les guider vers les nouvelles artères irriguant la station.

Sur le volet transports, le TESO va transformer la gare Matabiau en un nœud multimodal propre à répondre à la croissance de l’offre de transports en commun et aux besoins des usagers. En termes de dynamique urbaine, il permettra l’amélioration des quartiers existants autour de la gare, en procédant à un renouvellement des constructions, et en créant de nouveaux logements, bureaux, commerces et équipements publics. Les chiffres sont tels qu’ils donneraient le vertige :

Si l’on voulait comparer ce projet à d’autres semblables sur le territoire, seuls Euralille, troisième quartier d’affaires en France après La Défense, à Paris, et La Part-Dieu, à Lyon, pourraient rivaliser. « C’est le projet urbain le plus important de la région pour les 20 prochaines années », a résumé le maire Jean-Luc Moudenc, en 2014.

Pour autant, la ressemblance devrait s’arrêter à l’ampleur du périmètre d’intervention.

« La volonté n’est surtout pas de faire un grand centre commercial comme Euralille. Nous souhaitons une programmation maîtrisée. Que ce qui se développe ici ne porte pas atteinte au centre-ville, mais le renforce. »
Jean-Michel Lattes, , premier adjoint au maire de Toulouse

Les Toulousains vont être consultés sur ce projet à partir du 14 mars, et jusqu’au 30 avril, dans le cadre d’une grande enquête publique. Ce moment citoyen préalable à la phase opérationnelle la plus consistante du projet déterminera notamment :

Pour rappel, la troisième ligne de métro prévoit déjà trois stations dans ce secteur : Marengo, Bonnefoy et Raynal. Un moyen idéal d’insérer ces zones en reconversion dans un schéma de déploiement territorial ambitieux. Matabiau se trouvera ainsi en connexion avec les zones économiques de Labège et de Colomiers, et les secteurs Bonnefoy et Raynal-Raisins s’en verront désenclavés.

Secteur Matabiau

Afin de désenclaver la gare Matabiau et les quartiers qui l’environnent, le projet veut s’appuyer sur une reconquête de la friche ferroviaire qui y est nichée, et qui se trouve idéalement située au cœur de la métropole. Elle sera peu à peu transformée en un nouveau quartier mixte, accueillant logements, bureaux, commerces et services.

Pour ce qui est des aménagements des abords de la gare, ils passeront par une modification du parvis existant, le parvis Canal. À terme, il deviendra parvis principal, mais sera soutenu par un autre parvis et deux autres entrées qui signeront l’ouverture de la gare sur ses quatre côtés, et non plus seulement sur le centre-ville. Une fois achevée la couverture de l’écluse Matabiau, qui est déjà en cours, ce parvis Canal offrira un espace bien plus large et propice à la flânerie que le parvis historique.

« On passe d’un parvis unique actuellement à, demain, deux parvis importants et quatre entrées de gare. »
Raphaël Catonnet, directeur général d’Europolia, la société publique locale d’aménagement de Toulouse Métropole

En parallèle, les boulevards Bonrepos et Pierre Semard sont en cours d’aménagement. D’ici fin 2019, ils seront passés de trois à deux voies, ils comprendront une nouvelle piste cyclable et une deuxième rangée d’arbres.

Une fois réaménagés, ces deux boulevards devraient permettre de tisser un lien nouveau entre le centre historique et le centre-ville étendu par-delà le canal et les chemins de fer. Les artères Bayard, Matabiau, et Jean Jaurès, fraichement rénovées aussi, assainies, végétalisées, et fortes d’une nouvelles attractivité, viendront compléter ce tissu urbain et affiner cette invitation à investir nouvellement le secteur. Si tout se passe comme prévu, les futures ramblas Jean Jaurès mèneront jusqu’à un nouveau pont Riquet élargi, au pied d’une tour Occitanie qui se fera le bâtiment « signal » du projet, à quelques pas de la gare et de sa future extension rue Périole.

Secteur Marengo-Périole

L’extension de la gare vers Marengo, c’est-à-dire vers la rue Périole et la Médiathèque José Cabanis, constitue l’un des éléments-clés du projet. Elle est d’ailleurs déjà présente dans le TESO depuis son stade embryonnaire, au tournant de la dernière décennie.

Ce nouveau pôle sera relié au bâtiment voyageurs historique par de nouveaux tunnels, et sera organisé en trois niveaux : un parvis, une mezzanine, et une galerie au niveau des voies ferrées, « qui proposera des espaces de service aux voyageurs et des locaux techniques », comme l’indique le dossier de concertation.

Le futur pôle d’échange multimodal (PEM) de Matabiau sera donc structuré « à cheval » sur les rails, ce qui démultipliera ses accès et facilitera l’enjambement des voies ferrées. Ce pôle se fera le nœud de croisement des lignes de chemin de fer, des lignes de bus métropolitaines et départementales, de la ligne A du métro et de la 3e ligne de métro.

Le nouveau bâtiment voyageur, qui s’installera ainsi rue Périole derrière les bureaux de Toulouse Métropole, offrira une grande salle d’échange qui permettra aux voyageurs de rejoindre les parkings, les guichets du métro, les quais ferroviaires et le bâtiment historique. L’architecture du bâtiment n’a encore rien de définitif, mais la SNCF a déjà dévoilé quelques images de synthèse qui permettent de se figurer un peu le projet.

Le calendrier va s’avérer plutôt serré pour ce secteur, puisque les bâtiments actuels de la SNCF, rue Périole, doivent être démolis à partir de 2021. Au lancement de la 3e ligne de métro, prévu pour fin 2024 ou 2025 suivant la poursuite de ce dossier, le nouvel espace voyageur devrait ouvrir partiellement, son ouverture totale étant annoncée pour 2026.

Ce bâtiment est d’ores et déjà réfléchi comme si la Ligne à Grande Vitesse (LGV) devait se faire, puisque le pôle sera adapté à l’arrivée du TGV.

En parallèle, le quartier accueillera de nouveaux immeubles rue Périole, aux abords de cette future façade de la gare. Ils seront prioritairement dédiés aux logements.

La gare routière déménagera-t-elle dans le futur pôle d’échanges multimodal parvis Marengo ?

Le devenir de la gare routière, située actuellement boulevard Pierre-Semard, est encore en suspens. Le plan guide du projet avait prévu son déménagement côté Marengo, et l'urbaniste du projet, Joan Busquets, s’y est montré favorable au nom de l'intégration au pôle multimodal.

« Nous étudions son déplacement dans le secteur Périole. »
Jean-Michel Lattes, premier adjoint au maire de Toulouse

Ce qui est certain, c’est que le Conseil départemental vient d’investir 730.000 euros pour en réaménager le hall d’accueil et mettre le bâtiment aux normes d’accessibilité.

Mais la question du transfert, elle, n’est pas encore arrêtée. Son coût, estimé à 60 millions d'euros à la charge de la Région, risque de peser lourd dans la balance du projet. Le Département n'y est pas favorable :

« Elle fonctionne bien, elle est dans le Top 4 des plus accueillantes parmi 110 sites en France. »
Pascal Bourreau, conseiller départemental

Rétropédalage sur la circulation parvis Marengo

Le parvis Marengo, l’un des quatre parvis piéton de la future gare, avait un temps été pensé au sein d’un plus vaste projet. Les élus ambitionnaient alors de supprimer le tourniquet et de transformer le Boulevard Marengo faisant le tour de l’esplanade en voies de circulation réservées aux vélos, aux piétons et aux bus.

Le plan a, depuis, été recalibré sur des objectifs moins ambitieux. Les services techniques ont du trancher en faveur d’un maintien du tourniquet, tout de même réaménagé avec une réduction du nombre de voies de circulation pour les voitures. Ce projet prévoit aussi :

Ce nouveau bâtiment proposerait deux entrées vers la gare : une entrée principale au sud, à proximité du pont Riquet, qui donnerait sur le parvis Marengo et la Médiathèque, et une entrée secondaire, qui offrirait un accès depuis la rue de Périole.

« Le parvis deviendra un lieu de vie où l’on pourra flâner dans les boutiques avant de prendre un train ou de déjeuner entre deux rendez-vous. Ponctué de kiosques et de terrasses ombragées, le parvis sera également structuré de plantations. »
Dossier de concertation du projet TESO

Le canevas se précise de plus en plus sur l’aménagement de ce secteur, mais tout n’est pas encore fixé. Les images communiquées par la métropole permettent néanmoins de se figurer les transformations à venir.

Secteur Raynal – Raisin

Toulouse Métropole est propriétaire de la grande majorité des terrains concernés par une restructuration sur ce secteur au nord-ouest de la gare. Aujourd’hui occupés par les ateliers municipaux comprenant des anciennes installations techniques, ces terrains accueilleront à terme un nouvel espace résidentiel, concentrant 35% des logements, 15% des bureaux et 10% des commerces de l’ensemble du projet, et bénéficiant de toutes les offres de services complémentaires :

« Il est prévu une crèche, une école, un gymnase. Cela sera plutôt résidentiel. Pour protéger les riverains des nuisances, des bureaux sont envisagés à proximité des voies ferrées. Tel un écran contre le bruit. »
Raphaël Catonnet, directeur général d’Europolia, la société publique locale d’aménagement de Toulouse Métropole

Ce projet de secteur prévoit aussi la création d’une voie nouvelle, parallèle aux voies ferrées : elle se nommera la voie Raynal et mesurera 320 mètres. Elle permettra de relier la rue Pierre et Marie Curie en provenance de Barrière-de-Paris et le futur parvis de Lyon, permettant ainsi une meilleure connexion de la gare avec les quartiers Nord, et déchargeant le Boulevard des Minimes, le long du canal, d’une part du trafic automobile.

« C’est une mise en connexion.
Cela permet aux habitants du quartier des Minimes d’emprunter cette voie sans être obligés d’emprunter le canal du Midi. »
Raphaël Catonnet, directeur général d’Europolia, la société publique locale d’aménagement de Toulouse Métropole

Une autre voie nouvelle complètera ce nouveau canevas : une passerelle, créée entre la rue de la Concorde et le chemin du Raisin, qui sera adaptée aux cyclistes, aux poussettes et aux personnes à mobilité réduite. Elle ouvrira un lien direct entre les quartiers des Chalets, de Jeanne d’Arc, et le nouveau quartier des Raisins, qui s’en verra ainsi désenclavé.

Quant aux terrains dits de la Sernam (Société française de transport de bagages et de colis), encore propriété de la SNCF, ils devraient également bénéficier d’une requalification.

« Les terrains pourraient être reconvertis en bureaux dans ce secteur. L’objectif est de signer en juin 2019 le protocole qui fixe le calendrier de libération du foncier. C’est un énorme travail. Il y a des diagnostics à faire sur la déconstruction, la dépollution… »
Raphaël Catonnet, directeur général d’Europolia, la société publique locale d’aménagement de Toulouse Métropole

Un nouveau parc urbain

Derrière l’ensemble immobilier actuel des Raisins, il est prévu que le jardin public actuellement accolé aux terrains de la SNCF, après le pont de voie ferrée faubourg Bonnefoy, voie sa superficie doubler. L’idée est de créer au cœur de ce nouveau quartier redynamisé un grand espace vert, emblème végétal du projet.

Le projet TESO compte également s’appuyer sur le jardin Michelet pour le faire muter en un véritable poumon vert.

Secteur Lyon

Le projet TESO prévoit également l’élargissement de l’avenue de Lyon et son renouvellement urbain. Plus précisément, ce secteur doit accueillir sur 2 hectares :

Expropriation sur 2 hectares au début de l’Avenue de Lyon

Cette opération implique la destruction du quartier situé entre la gare routière et la voie ferrée. En tout, 2 hectares sont concernés, dont plusieurs îlots de maisons situées le long des rues des Jumeaux, Chabanon, du Maroc, de l’avenue de Lyon mais aussi le long de la rue des Cheminots et de la rue Saint-Laurent du côté du faubourg Bonnefoy.

« Dans ce secteur, il y a du « déjà là » selon l’expression d’un grand urbaniste qui s’appelle Nicolas Michelin.
Ce déjà là, nous allons chercher à mieux l’intégrer, à ce qu’il puisse bénéficier de la dynamique de l’opération. »
Raphaël Catonnet, directeur général d’Europolia, la société publique locale d’aménagement de Toulouse Métropole

Ce périmètre est particulièrement marqué par les problématiques de dégradation et de vétusté de l’habitat. Repéré dès 2011 pour accueillir une opération immobilière sous l’égide d’Europolia, la société publique locale d’aménagement chargée de conduire le projet autour de Matabiau, le secteur est, depuis, racheté peu à peu par l’Etablissement Public Foncier Local (EPFL) de la Métropole. Concrètement, cela signifie que la collectivité rachète à l’amiable des appartements ou préempte des locaux dès que des biens sont mis en vente sur ce périmètre de deux hectares.

L’objectif ? Racheter le plus de biens possible avant la déclaration d’utilité publique du projet, que la municipalité espère obtenir à l’issue de l’Enquête publique ouverte au printemps 2019 sur le projet Toulouse EuroSudOuest.

Si est actée à la suite de l’Enquête la « déclaration d'utilité publique des travaux nécessaires à la réalisation des opérations structurantes de Toulouse EuroSudOuest », cela ouvrira la possibilité d’expropriation des propriétaires qui n’auront pas vendu leur bien d’ici-là. « Toujours au prix du marché », assure Europolia.

À l’heure actuelle, plus de 70 % des acquisitions foncières à réaliser ont déjà eu lieu.

« Il faut désormais achever ce processus d’acquisition et de relogement. Et le moment venu, nous lancerons un appel à projets pour les futures constructions. »
Jean-Michel Lattes, premier adjoint au maire de Toulouse

Des logements, des bureaux et un nouveau parvis pour la gare

Une fois rachetées toutes les constructions, à l’horizon 2020, l’opération de renouvellement urbain pourra se concrétiser. Le projet doit mêler bureaux et logements, notamment du côté de l’actuelle Halle Sernam située près de la voie ferrée.

Ce secteur doit aussi voit la création d’un nouveau parvis de la gare, le Parvis de Lyon, au niveau du pont de la voie ferrée qui surplombe l’avenue de Lyon.

« À court terme, avant une maîtrise foncière complète du secteur, le renouvellement urbain du secteur de l’avenue de Lyon doit s’orienter vers des projets de logements et d’espaces publics en lien avec le Pôle d’Echange Multimodal de Toulouse Matabiau.
Des effets d’opportunité ne sont pas à exclure pour des projets tertiaires mais il est évident qu’ils dépendront d’un changement d’image du secteur et donc d’interventions préalables en matière de rénovation urbaine. »
Délibération votée au Conseil de métropole le 03/10/2017

Ce que l’on doit comprendre ici, c’est que les professionnels de l’immobilier sont pour l’instant réticents à s’installer dans ce secteur Lyon. Les aménagements préalables seront donc nécessaires à l’implantation de ces « opportunités » et « projets tertiaires ».

« À moyen terme, une fois le foncier totalement maîtrisé, le projet de renouvellement urbain doit s’orienter en priorité vers la réalisation d’une programmation tertiaire, en lien avec les développements immobiliers plus conséquents prévus à l’emplacement de la halle Sernam. »
Délibération votée au Conseil de métropole le 03/10/2017

Un hôtel nouvelle génération en approche ?

Le projet TESO prévoit déjà l’installation d’un hôtel de luxe au sein de la tour Occitanie, mais il se pourrait qu’un second établissement hôtelier d’un nouveau genre s’installe sur l’avenue du Lyon. Cet hôtel veut s’inspirer en partie de ce qui va se faire au Mama Shelter sur le boulevard Lazare-Carnot, qui proposera une salle de cinéma et une terrasse avec vue sur les boulevards.

L’idée est ici de créer « un hôtel de nouvelle génération », qui serait en même temps une auberge de jeunesse et un lieu de vie ouvert aux Toulousains.

« Fondé sur un concept hybride associant les modèles de l’hôtellerie économique et des auberges de jeunesse, l’établissement pourra bénéficier du renouveau de la vie urbaine autour des parvis. »
Dossier de concertation du projet TESO

S’il se confirme, ce projet d’hôtel pourrait se concrétiser après 2020, quand la portion du début de l’avenue de Lyon aura été entièrement rachetée, rasée et reconstruite.

Un quartier avec des immeubles plus hauts

La SNCF désirant finalement garder vierge certains de ses terrains en bordures de voies ferrées, il est probable que les projets d’immeubles de bureaux prévus initialement le long des lignes de chemin de fer du côté de Raynal ne se voient pas le jour.

Ce redimensionnement du projet occasionnera une élévation des bâtiments, puisque le projet ne baissera pas pour autant ses objectifs en m² de bureaux proposés. Les surfaces de bureaux promises se trouveront donc transférées sur d’autres immeubles, qui monteront ainsi en étages. Ce sera le cas sur plusieurs sites du périmètre, qui pourront en conséquence accueillir des immeubles s’élevant jusqu’à 50m de haut.

Sont a priori concernés :

Ce besoin de revoir la hauteur des immeubles à la hausse est d’autant plus prégnant que le nombre de logements à livrer a été augmenté de 1000 logements par rapport au projet présenté lors de la concertation de 2016 (passant de 2000 à 3000). Un plafond a été fixé à 50m de hauteur, mais cela ne semble pas suffire à apaiser les craintes des riverains. Sur ce point, les aménageurs se sont voulus rassurants :

« Cela ne veut pas dire que ce plafond sera atteint sur l’ensemble du secteur. »
Raphaël Catonnet, directeur général d’Europolia, la société publique locale d’aménagement de Toulouse Métropole
« Nous sommes encore en phase d’élaboration. »
Jean-Michel Lattes, premier adjoint au maire de Toulouse

L’enquête publique donnera des volumes généraux de constructibilité.

La tour Occitanie au cœur des débats

Depuis 2016, le projet TESO n’a donc cessé de prendre en hauteur. Il prévoit désormais l’élévation d’une tour de 150m de haut et de 40 étages à proximité directe de la nouvelle gare Matabiau et de son extension côté Marengo, au niveau du débouché du pont Riquet côté Médiathèque, sur le site de l’ancien centre de tri de la SNCF.

Ce projet, nommé « Tour Occitanie », est porté par le promoteur français La compagnie de Phalsbourg. Il a été conçu par l’architecte Daniel Libeskind, à qui l’on doit le Musée Royal d’Histoire Naturelle de Toronto, le Musée d’Art Moderne de Denver, le musée juif de Berlin, ou encore le schéma directeur du nouveau World Trade Center de New York, et par le cabinet local Kardham-Cardete Huet Architecture.

La tour prévoit d’intégrer, sur ses 30.000 m² de surface plancher :

Le calendrier prévisionnel prévoit que la tour voie le jour en 2022. Mais il faudra d’abord qu’elle obtienne des Toulousains consultés en Enquête publique ce printemps la délivrance définitive de son permis de construire.

Un nouveau symbole pour le projet TESO

Depuis qu’elle a fait surface, l’hypothèse de cette tour cristallise les craintes, les espoirs et les émulations autour du projet TESO. Il ne pouvait en aller autrement. Un édifice d’une telle dimension devait forcément changer la face de ce programme immobilier en en devenant l’axe pivot, le bâtiment « signal » et l’élément symbolique actant l’entrée de Toulouse, la « ville basse » historique, dans une nouvelle ère.

« Pour nous, il s’agira d’un marqueur de notre attractivité économique, mais également d’une certaine audace en matière d’urbanisme. Non, Toulouse ne manque pas d’ambition ! »
Jean-Luc Moudenc, maire de Toulouse et président de la métropole

Entre temps, la tour est devenu un élément clivant du projet : « geste architectural fort » pour les uns, folie des grandeurs en plein cœur des quartiers résidentiels pour les autres, la Tour Occitanie cristallise des visions différentes de l’urbanisme d’aujourd’hui, et de demain. Si bien que les aménageurs sont, depuis, amenés à la recentrer comme l’un des éléments seulement du projet.

« Cette tour, certes emblématique, ne peut résumer ce vaste projet d’aménagement. »
Raphaël Catonnet, directeur général d’Europolia, la société publique locale d’aménagement de Toulouse Métropole

Un recours déposé début octobre contre le projet de Tour Occitanie

Vendredi 5 octobre 2018, le collectif citoyen « Non au gratte-ciel de Toulouse », qui regroupe des citoyens, l’association Droit au logement Haute-Garonne (DAL31) et les Amis de la Terre-Midi Pyrénées, a annoncé déposer un recours contentieux devant le tribunal administratif de Toulouse, « à l’encontre d’une délibération, adoptée en conseil de Toulouse Métropole il y a quelques mois et qui a autorisé une simplification des règles d’urbanisme imposées au projet de la Tour d’Occitanie ».

« Nous souhaitons faire de cette tour sur laquelle les Toulousains n’ont pas été concertés un enjeu des prochaines municipales de 2020. »
Daniel Roussée coprésident des Amis de la Terre
« La barre n’est plus tenue par le maire en matière de logement et d’urbanisme mais par les promoteurs. Cette tour est contre-productive sur le plan social et néfaste pour les habitants. »
François Piquemal, porte-parole du Droit au logement 31

La modification du Plan Local d’Urbanisme (PLU) dénoncée par les association a été actée au début de l’année 2018. Elle doit permettre au promoteur, la Compagnie de Phalsbourg, d’être déchargé de ses obligations concernant la construction de logements sociaux au sein du projet de Tour. Ces obligations ont été diluées à l’ensemble du projet Toulouse Euro Sud-Ouest, qui s’étale sur toute la zone encerclant la gare. Cela signifie que les 35% de logements qui auraient dû être réalisés dans la Tour pourront être disséminés sur l’ensemble du projet urbain.

« C’est un cadeau que l’on estime autour de 10 millions d’euros au promoteur. Cette modification (lui) permet aussi d’échapper à l’application des normes environnementales de construction relatives aux bâtiments à énergie positive obligatoires à partir de 2020. »
Richard Mebaoudj, porte-parole du collectif « Non au gratte-ciel de Toulouse »

Pour le moment, aucune suite connue n’a été donnée à ce recours. Le permis de construire de la tour a bien été déposé cet été, et elle va se soumettre ce printemps à l’Enquête publique qui doit valider définitivement son édification.

Le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc, se félicite déjà des avis recueillis dans l’Enquête réalisée l’an dernier au sujet de la ZAC Matabiau.

« L’enquête publique consacrée au projet de la zone d’activité commerciale de Matabiau a généré 400 expressions citoyennes. 80 seulement étaient défavorables à la Tour. Une plus large consultation a pu être menée dans le cadre de l’enquête publique sur le nouveau Plan local d’urbanisme intercommunal : sur 2 850 dires, 80 sont contre la Tour… Donc oui, le projet remporte l’adhésion des Toulousains. »
Jean-Luc Moudenc, maire de Toulouse et président de la métropole

La nouvelle Enquête devrait donc permettre de confirmer ou d’infirmer ce sentiment du maire.

Le permis de construire et le projet global soumis à Enquête publique unique

L’Enquête publique unique qui s’ouvrira le 14 mars et durera jusqu’au 30 avril 2019 inclus portera à la fois sur le projet Toulouse Euro Sud-Ouest et sur la Tour d’Occitanie. Une décision qui a été prise en Conseil Métropolitain, jeudi 4 octobre 2018. Le but ? « Porter à la connaissance du public l’ensemble des composantes du projet (…) incluant le projet de Tour d’Occitanie ».

Pour les opposants au projet, cette enquête va être l’occasion de mobiliser les habitants sur le sujet.

« Elle va nous permettre d’informer et de mobiliser l’opinion pour que de nombreuses observations soient formulées par les Toulousains qui vont enfin pouvoir donner leur avis sur ce projet. »
Richard Mebaoudj, porte-parole du collectif « Non au gratte-ciel de Toulouse »

L’Enquête publique unique recueillera donc les observations des citoyens, nécessaires et préalables :

Le projet TESO-Matabiau critiqué par l'Autorité environnementale

Début juillet 2018, le projet a obtenu un avis favorable de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture. En revanche, début décembre dernier, il a été épinglé par l'Autorité environnementale, l’organisme national chargé d’émettre un avis sur l’évaluation environnementale des plans et programmes.

L’AE a souligné la qualité d’élaboration du projet. Néanmoins, elle a dû conclure : « Des actualisations de l’évaluation environnementale seront nécessaires pour les autorisations. » Le rapport résume :

« Le large périmètre retenu, incluant aménagements ferroviaires et urbains, ainsi que la coordination des réflexions des maîtres d’ouvrage concernés témoignent d’une démarche d’élaboration du projet et d’évaluation environnementale de qualité.
Le dossier souffre cependant d’imprécisions voire d’incohérences dans le contenu ou les caractéristiques du projet (gare routière, travaux de voirie, surfaces de programmation immobilière, travaux déjà en cours ou autorisés… et tout particulièrement la non-inclusion de la modernisation du nœud ferroviaire toulousain), à corriger dans les meilleurs délais. »
Rapport de l’Autorité environnementale sur le projet Toulouse Euro Sud-Ouest

L’AE s’est aussi inquiétée des incidences du projet sur la candidature de la ville de Toulouse à l’inscription au patrimoine mondial de l’Unesco, sur son inscription dans le « Plan Canal », et sur sa compatibilité avec le PLUi, en particulier sur la diversité sociale.

Sources :

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