Locations touristiques : les impacts de la loi Airbnb sur les bailleurs dès 2025
SOMMAIRE
- "Loi Airbnb" une réforme pour libérer des logements face à la crise immobilière
- Un abattement fiscal qui passe de 50% à 30% dès 2025
- Une loi contre les passoires thermiques en location sur Airbnb
- La loi AirBnb offre de nouveaux outils de régulation pour les maires
- Durée de location limitée à 90 jours
- Zones réservées et quotas sous conditions
- Enregistrement obligatoire
- Justificatif de domicile exigé
- Airbnb ouvre un portail de données aux municipalités
- Une obligation légale présentée comme une initiative
Adoptée pour rééquilibrer un marché locatif sous tension, la loi Le Meur, surnommée « anti-Airbnb », a été publiée au journal officiel le 20 novembre. Le texte a pour ambition d'inciter les propriétaires à privilégier les locations longue durée, délaissées au profit des meublés touristiques.
Dès 2025, les affaires fleurissantes des bailleurs touristiques sur Airbnb et Abritel devront s’adapter à des avantages fiscaux dégradés et à un cadre réglementaire renforcé.
Entre mesures incitatives et restrictions, cette loi entend répondre en partie à l'urgence sociale dans les zones où la demande locative dépasse largement l’offre disponible. Décryptage...
"Loi Airbnb" une réforme pour libérer des logements face à la crise immobilière
Après deux ans de discussions et d’ajustements, la proposition de loi visant à encadrer les locations de courte durée a été adoptée par l’Assemblée nationale le 7 novembre 2024. Avec 168 voix pour et 54 contre, ce texte porté par Annaïg Le Meur (Ensemble pour la République) et Iñaki Echaniz (Socialistes) a franchi la dernière étape législative, avec la bénédiction de la ministre du Logement, Valérie Létard.
La réforme cible directement les avantages fiscaux associés aux locations touristiques sur des plateformes comme Airbnb ou Abritel. C'est un texte pour les Français, pour tous ceux qui recherchent un logement de longue durée et qui ne parviennent pas à se loger
, a rappelé Valérie Létard au Sénat, pointant du doigt une crise de logement qui frappe particulièrement les grandes métropoles.
L’objectif ? Libérer des biens immobiliers dans des villes où la tension locative est à son paroxysme, comme Bordeaux ou Toulouse. Ces plateformes, accusées d’aggraver la pénurie de logements accessibles, seront désormais soumises à des restrictions renforcées. Une réponse législative qui, selon ses défenseurs, pourrait remettre sur le marché des milliers de logements aujourd’hui dédiés au tourisme.
Un abattement fiscal qui passe de 50% à 30% dès 2025
L’un des changements qui fait grincer des dents chez les loueurs AirBnb concerne l’abattement fiscal sur les revenus locatifs des meublés touristiques.
Dès 2025, celui-ci passe de 50 % à 30 %, s’alignant ainsi sur le régime applicable aux locations nues classiques, qui nécessitent un bail de trois ans. De plus, le plafond de revenus locatifs ouvrant droit à cet abattement est abaissé de 77 700 € à 15 000 €.
Pour les meublés classés, bénéficiant jusqu’ici d’un abattement de 71 %, ce dernier est réduit à 50 %, avec un plafond de revenus revu de 188 700 € à 77 000 €.
Une loi contre les passoires thermiques en location sur Airbnb
Autre mesure clé : les logements mis en location en meublés touristiques devront répondre aux normes énergétiques imposées à la location longue durée.
- 2025 : Les logements classés G (passoires thermiques) ne pourront plus être loués.
- 2028 : Les biens avec une étiquette énergétique F seront interdits à la location.
- 2034 : Seuls les logements disposant d’un diagnostic de performance énergétique (DPE) au minimum D seront autorisés à la location.
- 2034 : Les hébergements déjà loués sur Airbnb auront jusqu’à cette date pour atteindre un DPE de catégorie D.
La députée LFI Danielle Simonnet a déploré auprès de Capital que la droite et l'extrême droite aient réussi à faire en sorte que le parc existant (par opposition aux nouvelles locations) de meublés touristiques bénéficie de dix ans pour se conformer aux obligations de performance énergétique tout en reconnaissant le progrès concret de ce texte pour lutter contre la prolifération des meublés touristiques.
La loi AirBnb offre de nouveaux outils de régulation pour les maires
Outre ce premier coup aux bénéfices des loueurs AirBnb, la loi Le Meur fournit également aux élus locaux un arsenal de mesures inédites pour mieux encadrer les meublés touristiques et privilégier le logement permanent.
Présentée comme une véritable « boîte à outils », cette réforme promet de donner plus de latitude aux maires pour réguler ces locations en pleine expansion.
Durée de location limitée à 90 jours
Parmi les mesures phares, les communes pourront désormais abaisser à 90 jours par an la durée maximale autorisée pour la location touristique des résidences principales, contre 120 jours actuellement.
Zones réservées et quotas sous conditions
Les maires auront également la possibilité de définir des zones spécifiquement dédiées à la construction de résidences principales. Cette mesure, cependant, s’adresse aux communes situées en zones tendues ou comptant plus de 20 % de résidences secondaires. En complément, les municipalités pourront imposer des quotas pour limiter le nombre de meublés touristiques.
Enregistrement obligatoire
Enfin, la loi instaure l’obligation d’un numéro d’enregistrement pour tous les meublés touristiques. Objectif : renforcer la traçabilité des biens mis en location sur des plateformes comme Airbnb et lutter plus efficacement contre les locations illégales.
Justificatif de domicile exigé
Fini les déclarations sur l’honneur. Les propriétaires souhaitant louer leur résidence principale devront désormais fournir un justificatif de domicile. Une mesure qui vise à limiter les abus et à garantir que les logements concernés respectent bien leur usage déclaré.
Avec ces nouvelles règles, la loi Le Meur ambitionne d’équilibrer le marché locatif, en soutenant l’accès au logement pour les résidents tout en donnant aux maires les moyens de maîtriser le développement des meublés touristiques dans leur commune. Une réponse aux dérives qui, selon de nombreux élus, contribuent à aggraver la crise du logement.
Si certains saluent ces mesures comme une avancée pour contrer l’expansion des meublés touristiques, d’autres, dont les plateformes concernées, déplorent un durcissement des contraintes administratives et fiscales. Airbnb a notamment souligné que ces nouvelles obligations pourraient pénaliser les familles louant occasionnellement leur logement pour compléter leurs revenus.
Airbnb ouvre un portail de données aux municipalités
Alors que les municipalités et les collectifs de résidents réclament depuis longtemps plus de transparence de la part d'Airbnb, et à peine dix jours après l'adoption par le Parlement de la loi Lemeure, la plateforme américaine a annoncé ce lundi 18 novembre le lancement imminent d'un portail d'accès à ses données pour les mairies. Cette annonce, faite à France Info à la veille du Salon des maires de France, permet à Airbnb de se présenter sous un jour favorable face à des élus locaux méfiants.
Parmi les informations accessibles via ce portail—déjà opérationnel et nommé « Panda » pour Portail d'accès national aux données Airbnb—figureront, selon France Info, le nombre de nuitées et de voyageurs accueillis par les hôtes, les retombées économiques générées par les séjours , ainsi que le nombre d'hébergements et leur nature (chambre chez l'habitant, résidence principale, résidence secondaire ou locations meublées touristiques dédiées) dans la ville et dans les quartiers .
De quoi permettre aux municipalités de mieux appréhender les principaux flux touristiques et l’activité des hôtes, évaluer les bénéfices de la location meublée touristique localement et visualiser la part de meublés de tourisme dédiés à la courte durée au sein de chaque quartier
, souligne la plateforme.
Une obligation légale présentée comme une initiative
En réalité, Airbnb, comme toutes les autres plateformes de location de courte durée, est déjà légalement tenue de fournir ces données—une loi adoptée par le Parlement européen en 2023 a même rendu cette transmission mensuelle obligatoire. Rien de vraiment nouveau, donc, si ce n'est un accès aux données en temps réel.
Pour le sénateur et conseiller communiste de Paris, Ian Brossat, qui lutte depuis des années contre les excès de la plateforme au sein de la première destination touristique mondiale, la démarche est certes « culottée », mais le procédé est habituel chez AirBnb. Ils cherchent à afficher un visage plus aimable au moment où l'étau se resserre autour d'eux
, ajoute l'ancien adjoint au logement d'Anne Hidalgo.
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