Taxe foncière 2026 : 7,4 millions de logements réévalués, quel impact pour les propriétaires et pour Toulouse ?
SOMMAIRE
- Une "correction ciblée" qui chiffre à plus de 466 M€
- Que change précisemment la mise à jour des données ?
- Qui sera touché… et de combien ?
- Une hausse 2026 qui s’ajoute à dix ans de progression rapide
- Bercy face aux élus : équité fiscale contre ras-le-bol d’impôts
- Quels recours pour les propriétaires concernés ?
- Quel impact à Toulouse ?
Un travail de « fiabilisation » des bases foncières conduit par Bercy va relever la taxe foncière de 7,4 millions de logements en 2026. Officiellement, il s’agit d’aligner l’impôt sur la réalité des logements grâce aux critères de confort. Concrètement, la facture grimpe en moyenne de 63 euros par foyer concerné, pour un gain estimé à 466 millions d’euros pour les collectivités.
Une "correction ciblée" qui chiffre à plus de 466 M€
Mardi 18 novembre, le ministère de l’Économie a confirmé à l’AFP qu’une mise à jour nationale des fichiers de logements interviendra pour le calcul de la taxe foncière 2026. Cette opération, qualifiée de « fiabilisation des bases foncières », repose sur une campagne de correction des données utilisées par l’administration fiscale pour établir les avis d’imposition.
Selon les chiffres mis en avant par Le Parisien et repris par plusieurs médias, dont le HuffPost et Boursorama, 7,4 millions de logements verront leur taxe foncière augmenter à ce titre, sur un total d’environ 32 millions de logements imposés. La hausse moyenne par logement concerné est estimée à 63 euros, pour un produit supplémentaire d’environ 466 millions d’euros en faveur des collectivités locales.
Pour le gouvernement, il ne s’agit pas d’un nouvel impôt ni d’un relèvement de taux, mais d’une correction ciblée. « C’est une question d’efficacité et d’équité de l’impôt : que chacun paie selon le type de logement qu’il détient », défend le cabinet de la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin.
Que change précisemment la mise à jour des données ?
La taxe foncière repose sur la valeur locative cadastrale du bien. Cette valeur inclut la surface du logement, mais aussi des critères dits de confort : eau courante, électricité, WC, lavabo, baignoire ou douche, parfois chauffage ou climatisation. Chacun de ces équipements ajoute une « surface fictive » dans le calcul : par exemple 4 m² pour l’eau courante, 5 m² pour une baignoire, ce qui gonfle la base imposable.
Problème : ces fichiers s’appuient encore sur des informations souvent anciennes. Certains logements rénovés ou équipés depuis longtemps n’avaient jamais vu leurs données mises à jour. La Direction générale des finances publiques (DGFiP) résume l’enjeu :
« L’opération de fiabilisation des bases foncières qui va être menée en 2026 vise à prendre en compte ces éléments de confort lorsqu’ils ne sont pas aujourd’hui intégrés à la base foncière », explique-t-elle.
Cette intégration se fera automatiquement, sans déclaration supplémentaire du propriétaire. Les logements identifiés comme sous-déclarés en matière de confort verront leur surface fiscale augmenter, donc leur taxe foncière 2026.
La DGFiP souligne toutefois qu’un recours reste possible :
« Les propriétaires dont les logements ne seraient réellement pas équipés de ces installations pourront tout à fait contester leur imposition de taxe foncière et obtenir des dégrèvements correspondants », précise l’administration.
Qui sera touché… et de combien ?
D’après les estimations reprises par Europe 1 et Le Parisien, environ une maison sur quatre et 15 % des appartements de métropole seraient concernés par cette correction, avec de fortes disparités territoriales. En Haute-Corse, près de 60 % des logements pourraient voir leur base réévaluée, contre autour de 25 % à Paris et 10 % dans les Pays de la Loire ou en Isère.
Pour les 7,4 millions de logements touchés, la hausse moyenne annoncée est de 63 euros par an. Il s’agit d’une moyenne. Certains propriétaires subiront un ajustement limité à quelques dizaines d’euros ; d’autres, dont le logement cumule plusieurs critères jusque-là non pris en compte, subiront une augmentation plus marquée.
Les 32 millions de propriétaires assujettis à la taxe foncière ne sont donc pas tous exposés à cette hausse liée à la fiabilisation. Ceux dont les fichiers étaient déjà complets ne subiront, en principe, que la revalorisation annuelle classique des valeurs locatives, indexée sur l’inflation et fixée en loi de finances (autour de 1 % attendu pour 2026, contre 1,7 % en 2025).
Une hausse 2026 qui s’ajoute à dix ans de progression rapide
Même si la mise à jour des fichiers constitue la clé de l’augmentation 2026, elle intervient dans un contexte de hausse déjà forte de la taxe foncière. Selon le 19e Observatoire national des taxes foncières publié par l’Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI), la taxe foncière a augmenté en moyenne de 37,3 % entre 2014 et 2024, alors que les loyers n’ont progressé que de 8,7 % sur la même période.
L’UNPI estime que deux tiers de cette hausse sur dix ans proviennent de la majoration légale des valeurs locatives, décidée au niveau national, et un tiers des décisions locales sur les taux votés par les communes et intercommunalités.
L’année 2025 marque une parenthèse relative : dans les 200 plus grandes villes, la progression moyenne d’environ 1,7 % correspond surtout à la revalorisation nationale, les hausses de taux étant restées limitées à l’approche des municipales de 2026.
La hausse spécifique de 2026 se distingue par sa source : elle ne vient pas d’un vote des conseils municipaux, mais d’un recalibrage technique décidé par l’État sur les bases d’imposition.
Bercy face aux élus : équité fiscale contre ras-le-bol d’impôts
Du côté du gouvernement, la justification reste centrée sur l’idée d’égalité de traitement entre propriétaires. Bercy met en avant des logements sous-évalués par rapport à d’autres biens équipés de manière comparable. La « mise à jour » doit donc corriger des incohérences accumulées depuis plusieurs décennies.
Plusieurs élus, eux, contestent le moment et la méthode. Sur TF1, le maire RN de Perpignan, Louis Aliot, réagit ainsi à l’annonce :
« Vous n’allez pas expliquer aux gens qu’ils ont une douche chez eux et que du coup ils vont être taxé », déclare-t-il, critiquant une hausse jugée incompréhensible pour les ménages.
Depuis le Congrès des maires à Paris, le président de l’Association des maires de France (AMF), David Lisnard, replace cette hausse dans un débat plus large sur la pression fiscale. Interrogé sur Sud Radio après le rappel des 466 millions d’euros supplémentaires issus de la taxe foncière 2026, il résume son analyse :
« Que les impôts, il y en a trop. C’est pour ça que je les baisse dans ma commune », explique le maire de Cannes, avant de dénoncer des prélèvements supplémentaires décidés par l’État sur les finances locales.
Ces réactions alimentent un double procès :
- D’un côté, celui d’un impôt local de plus en plus lourd pour les propriétaires ;
- De l’autre, celui d’une fiscalité pilotée depuis Paris sur des bases techniques, que les élus locaux assument ensuite auprès de leurs administrés.
Quels recours pour les propriétaires concernés ?
Les propriétaires ne disposent d’aucun moyen pour s’opposer à la mise à jour des fichiers en amont. En revanche, plusieurs leviers existent une fois l’avis de taxe foncière reçu en 2026 :
- Vérifier les équipements indiqués : si le logement ne dispose pas de certains éléments de confort pris en compte (douche, baignoire, raccordement), le contribuable peut contester.
- Déposer une réclamation auprès du centre des finances publiques dans les délais légaux, en fournissant des justificatifs (photos, diagnostic, attestation).
- Le cas échéant, demander un dégrèvement lorsque l’administration reconnaît une erreur de fichier, ce que la DGFiP annonce explicitement : les contribuables « pourront tout à fait contester leur imposition (…) et obtenir des dégrèvements correspondants ».
Reste que, pour la majorité des 7,4 millions de logements concernés, cette hausse résultera de la reconnaissance d’équipements désormais standard, difficilement contestables. Dans un contexte où la taxe foncière a déjà progressé de près de 40 % en dix ans, cette « simple mise à jour » dresse un nouvel étage dans la construction de la fiscalité locale, sans toucher aux taux… mais en augmentant malgré tout l’impôt dû.
Quel impact à Toulouse ?
À Toulouse, le discours officiel pour 2026 reste celui d’une fiscalité locale stable. Le rapport d’orientations budgétaires 2026 de Toulouse Métropole, adopté le 15 octobre 2025, fixe comme cap d’« allier rigueur, investissements structurants et stabilité fiscale » pour bâtir le budget 2026, sans annoncer de hausse des taux de taxe foncière.
Le rapport du budget primitif 2025 indiquait déjà que la collectivité veut « protéger le pouvoir d’achat des habitants » et maintenir ses investissements sans relever les taux d’imposition. Un document de communication publié en 2025 rappelle enfin que Toulouse Métropole revendique « 0 augmentation d’impôt » depuis 2016, ce qui confirme une stratégie de gel des taux à l’échelle intercommunale.
La réforme des valeurs locatives aura pourtant clairement un impact sur les propriétaires toulousains. En cause ? La présence d'un parc ancien très important, concentré pour une large part dans l’hypercentre et les quartiers de maisons de faubourg.
Selon l’Insee, près de 35 % des résidences principales de Toulouse datent d’avant 1971 et plus de 60 % avant 1990.
L’Institut des politiques publiques montre que la révision des valeurs locatives augmente surtout la valeur fiscale des logements anciens rénovés dans les centres urbains denses et gentrifiés, profil qui correspond précisément à de nombreux quartiers toulousains.
Même si les élus maintiennent les taux en 2026, une part significative des propriétaires de logements anciens à Toulouse verra donc sa taxe foncière progresser sous l’effet de la mise à jour de la base d’imposition.
Morgane Caillière
Commentaires à propos de cet article :
Ajouter un commentaire